La Cathédrale, "vaste symphonie en pierre", avec ses "belles pages architecturales" est à la fois dynamique et éternelle.
Notre Dame de Paris, à l'image de ce 15ème siècle finissant dans lequel Hugo a choisi de situer son roman, est un "édifice de la transition", un édifice non figé, qui fait le lien entre l'art ROMAN et l'art GOTHIQUE. La cathédrale a, par rapport aux autres oeuvres d'art, a la particularité d'être une OEUVRE COLLECTIVE ; elle est le produit des forces réunies d'une époque, ouvriers et artistes, peuple et penseurs. Telle est surtout sa valeur, que d'être l'essence même de son siècle :
# les plus grands produits de l'architecture sont moins des oeuvres individuelles que des oeuvres sociales ; plutôt l'enfantement des peuples en travail que le jet des hommes de génie ; le dépôt que laisse une nation ; les entassements que font les siècles ; le résidu des évaporations successives de la société humaine ; en un mot, des espèces de formations. #
# Le temps est l'architecte, le peuple est le maçon. #
L'architecture, cependant, n'est qu'un aspect de l'art médiéval si vivant dans lequel se déploie l'intrigue de "Notre Dame de Paris". De fait, il faut noter les nombreuses références aux oeuvres du Moyen-âge et du début de la Renaissance, dont Hugo se sert non seulement pour peindre une époque pittoresque, mais aussi pour reconstituer le foisonnement artistique de ce monde disparu. La littérature , d'abord, est omniprésente dans le roman, que ce soit par le biais de références plus ou moins directes - à Rabelais par exemple - par le vocabulaire (volontiers rabelaisien lui aussi, que l'on songe aux termes "pharmacopolisant", et "matagraboliser", ou par la mention de genres médiévaux comme le mystère, la sotie et la bergerette. [ par exemple "sotie": farce de caractère satirique jouée au Moyen-âge, par des acteurs en costume de bouffon, représentant différents personnages d'un imaginaire "peuple sot", allégorie de la société du temps. "Le jeu du Prince des sots.... sottie, moralité et farce" de Pierre Gringoire (1512). ]
La peinture aussi est très présente, les peintres du Moyen-âge ou de la Renaissance étant souvent le modèle de "tableaux hugoliens" : Michel-Ange (ainsi que ses fresques de la chapelle Sixtine, la partie sous coupole de la basilique Saint Pierre de Rome.....) et Callot , Raphaël, à qui Hugo emprunte explicitement la description d'Esmeralda assise pensive à sa table, le Massachio, dont les vierges sont un autre modèle de la Bohémienne, dans le livre d'Hugo, ou encore Bosch, source possible des mendiants qui assaillent Gringoire, au livre II, et qui ressemblent à des faucheux, à des limaces, à d'abjectes créatures MIXTES que l'on retrouve dans les visions cauchemardesques du maître.
Enfin, les chansons, la sculpture, la tapisserie - art emblématique du 15ème siècle, ici incarné par la promise de Phoebus, la fille Gondelaurier - figurent dans le roman la vitalité culturelle du Moyen-Age.
-------------------------------
C'est une "Présentation" du roman "Notre Dame de Paris". Qu'il me plaira de compléter, de nouveau, dans un nouvel article.
"Ceci tuera cela", où se trouve annoncée la TRANSITION entre l'Architecture et le LIVRE comme supports de la pensée. De fait, l'imprimerie inventée en Allemagne par Gütenberg, arrivera en France en 1470, soit une décennie avant la date à laquelle se déroule l'intrigue, dans le roman de Victor Hugo... Cette invention marque, selon Hugo, une charnière essentielle dans l'histoire des hommes et dans celle de la pensée. "Au 15ème siècle, tout change. L'invention de l'imprimerie est le plus grand évènement de l'histoire."
Article mis en forme par Pierre-Jean le 26 juin 2021.
Salut, à très bientôt
PJ